Une visite en trois temps
La ville d’Hiroshima est chargée d’histoire et on a bien entendu prévu de visiter les monuments qui témoignent des évènements plus récents comme le musée et le mémorial de la bombe atomique, mais aussi le château et des jardins plus traditionnels. Néanmoins la métropole ne va pas concentrer toute notre attention puisqu'on fera aussi une excursion sur l'île de Miyajima, qui attire beaucoup de touristes, et une autre sur le circuit cycliste du shimanami kaido.
Miyajima
Nouvelle région, nouveau pass ferroviaire régional ! Et avec le ticket sanyo san’in, on peut prendre un train jusqu'à Miyajimaguchi, où même le ferry qui rejoint l'île est compris dans le prix. On sait que les temples et les daims sont très prisés des touristes donc on essaye d'arriver tôt le matin, avec un succès mitigé. L'affluence reste supportable et on accoste tout en prenant déjà les premières photos depuis le bateau.
À peine arrivés, on est accueillis par des hauts parleurs qui diffuse des messages nous priant de nous tenir à l'écart des daims pour maintenir leur mode de vie aussi sauvage que possible. Cependant les bêtes ne sont pas effrayées par le monde et les enfants en particulier ne résistent pas à les caresser ou leur glisser un peu de nourriture.
Si tous les visiteurs commencent déjà à se diriger vers le clou du spectacle, le grand torii du sanctuaire itsukushima, on décide de prévoir un itinéraire qui nous fait d'abord déambuler dans les rues du village, puis on montera le sentier qui passe à travers la montagne, et on sera de retour en fin de journée pour admirer à notre tour le Otorii.
Omotesando et Daisho In
La rue commerçante (omotesando) est déjà très animée et on repère glaces, gâteaux et toutes sortes de desserts qui pourraient nous intéresser le moment voulu. En attendant, de visites de lieux de cultes en photo de rue, on arrive bientôt à l'heure de manger.
Notre choix se porte sur un petit restaurant à la décoration traditionnelle, la gérante est au four et au moulin pour satisfaire les quelques tables toutes occupées par les visiteurs du jour. Les plats sont simples et bons, et c'est l'occasion de tester le unagidon, bol de riz à l'anguille, spécialité de la région.
On poursuit ensuite jusqu'au Daisho In, un temple (bouddhiste cette fois) bien connu pour ses centaines de statuettes coiffées de bonnets de laines.
On apprécie beaucoup l'ambiance ombragée à flanc de montagne, il y a plusieurs bâtiments à voir et tout est harmonieusement décoré.
On passe un peu de temps ici et quand on se décide à reprendre l'ascension de la colline, l'après-midi est déjà bien avancée. On poursuit donc seulement pendant quelques minutes, qui nous laissent tout de même le temps de croiser des daims un peu plus sauvages. On prend soin de rester à bonne distance, refroidis par les messages de prévention qui alertent de leur comportement parfois agressif en cette saison.
On entame donc la redescente avec en ligne de mire le sanctuaire principal.
Le O-Torii d’itsukushima
Ça y est, on est en bord de mer, pile poil pour la golden hour, et la star est au rendez-vous : il est temps de révéler le paparazzi en nous. On prend la fameuse porte en photo sous toutes les coutures avec les selfies de rigueur, et on se dirige vers l'entrée du sanctuaire.
Le bâtiment est imposant, relativement à son importance, mais l'architecture shinto et son style épuré ne tiennent pas la comparaison dans l'objectif des téléphones et appareils photo avec le spectacle impressionnant du O-Torii qui trône sur la marée haute.
La file d'attente qui s'étend pour prendre la photo dans l'axe de la porte tant convoitée nous décourage, surtout qu'on a déjà une belle vue juste en faisant un petit pas sur le côté. Avec ça, on est satisfait et on peut rentrer en ville avec le même trajet en transports qu’à l’aller. Avant de monter dans le ferry on a quand même le temps d’acheter deux petits gâteaux en forme de “momiji”, la feuille d’érable star de l’automne japonais.
Cette journée à Miyajima était vraiment plaisante, on a pu utiliser notre pass pour aller et revenir de l’île sans problème, il faisait beau et les temples étaient vraiment dépaysants. En plus l’atmosphère avec les daims en liberté ajoutait une petite note amusante à cette excursion. C’était très touristique comme attendu, mais on n’en a pas particulièrement souffert, il y avait de la place pour tout le monde.
Shimanami Kaido
Seule route non uniquement automobile qui relie les îles de Honshu (celle d’Hiroshima, donc) et Shikoku, les soixante-dix kilomètres du Shimanami Kaido sont entièrement balisés de pistes cyclables. Et ce n’est pas seulement la nostalgie de nos rues parisiennes qui nous ont amené là, c’est aussi le cadre exceptionnel de cette balade qui serpente d’ilot en ilot en empruntant des ponts tous aussi gigantesques les uns que les autres.
Tout d’abord il faut se rendre à Onomichi, point de départ de cette activité cyclable. Pas de problème avec le même pass ferroviaire, mais à ce moment du voyage le téléphone d’Eddine nous a lâché sans raison apparente, et il faut se repérer avec le seul appareil de Manue, qui n’est pas connecté à internet. Malgré tout on arrive facilement à destination mais, alors qu’on s’attendait à en voir partout, on a du mal à trouver où louer des vélos et où acheter un billet pour le petit bateau qui doit nous déposer sur l’île d’où partent effectivement les pistes. Des inquiétudes finalement infondées, puisqu’on paye la traversée à même le bateau, et qu’une boutique de location nous attend de l’autre côté, comme on l’avait lu sur internet auparavant.
On peut s’équiper avec un matériel de plutôt bonne qualité (casques compris), et les gérants sont très attentifs aux réglages de nos montures. Dans son intégralité la route est un peu longue à faire pour nous, surtout en une journée limitée par les horaires des transports, mais on va pédaler aussi longtemps que possible et on fera demi-tour quand on sera à peu près à la moitié.
On s’arrête faire quelques courses et on se lance enfin sur une épopée qui commence aussi bien que ce qu’on l’espérait, le temps est très beau et dégagé, ce qui nous offre des superbes panoramas depuis les hauteurs des ponts titanesques, accessibles au prix d’un effort physique pas toujours facile !
Kitsune ramen
Finalement il est temps de faire demi-tour, même si on repasse par des routes déjà empruntées la lumière de fin de journée nous permet d’admirer le paysage sous un angle nouveau.
Après avoir rendu les vélos, on peut clore la journée avec des donuts ! Ils étaient pas si terribles mais on a pu discuter avec des touristes australiens qui avaient prévu de faire la route le lendemain malgré leur âge plus avancés que le notre, avec nos recommandations on s’est senti un peu utiles et on a pu rentrer à Hiroshima satisfaits d’une belle journée !
Hiroshima
Partout dans le monde, le nom d’Hiroshima évoque dorénavant le site de la première attaque atomique pendant la Seconde Guerre mondiale, pourtant aujourd’hui la ville a dépassé cette tragédie pour devenir un symbole de paix et de résilience. Quand on arpente ses rues on ressent l’ambiance de ce centre culturel et économique, et surtout doté d’une gastronomie réputée dans tout le pays !
Capsule hôtel
Curiosité japonaise à la renommée désormais mondiale, les “capsule hotels”, où les dortoirs sont composés de lits individuels en espace clos, attirent l'attention des voyageurs autant par leur tarifs relativement bas que par la représentation d'une culture de l'optimisation de l'espace propre à un pays à la densité de population parfois extrême. Le Mallika hostel était assez bien positionné pour nous convaincre, surtout que notre dernière escale en auberge à Beppu était très appréciable ce qui nous a motivé à essayer de retrouver une ambiance similaire.
La gérante, une petite vieille dame, est très accueillante et on est plutôt bien installé dans ce confort rudimentaire. Bon, on a connu plus propre au Japon et l'ambiance entre les voyageurs est bien plus impersonnelle qu'à Beppu finalement mais ça fera bien l'affaire pendant les 4 nuits qui nous attendent.
On en oublierait presque qu'il va falloir se débrouiller avec un seul téléphone après la panne de celui d'Eddine.
Okonomimura
La gastronomie de cette région du Japon est toute aussi riche qu'ailleurs dans le pays et un plat se distingue en terme de renommée, l’okonomiyaki
Okonomiyaki
Hiroshima se dispute le titre de meilleure version de cette recette avec Osaka depuis longtemps, et pour la postérité il était impensable que nous ne prenions pas part au débat. On commencera par la base, en dînant dans une institution locale, okonomimura, un immeuble regroupant 4 étages de restaurants autour de l'okonomiyaki.
Il y a bien une affiche qui recense tous les établissements mais on a plus vite fait de choisir au hasard, alors on s'installe autour de la plaque de cuisson et on passe commande tout en regardant l’équipe de baseball locale, les Carps, se faire éliminer des playoffs en direct à la télévision. La plupart des clients sont en fait des touristes, mais un vieil habitué nous rejoint bientôt. Eddine tente d'établir la communication à travers le traducteur du téléphone, on n’aura juste la confirmation que c'est un fan des Carps, comme les propriétaires, désolé on n’est pas encore arrivé au chapitre “discuter au comptoir” de duolingo.
La bombe
Les visiteurs sont tellement nombreux qu'on a préféré décaler notre visite du “mémorial de la paix” à un matin de jour de semaine dans l'espoir d'éviter la foule. On peut néanmoins faire un premier tour du parc qui entoure le mémorial et qui présente plusieurs monuments en l’honneur de la paix.
La tragédie du 6 août 1945 est tellement présente dans l'imaginaire collectif mondial que ce lieu est une visite indispensable pour tous les visiteurs de la région mais aussi pour les écoliers en sortie scolaire, et c'est tout ce monde qui nous attend dans la visite du musée dédié. On fait le tour des expositions dans une ambiance assez pesante du fait de la lourdeur des évènements retracés.
Cependant le musée ne se contente pas de jouer sur les émotions mais nous relate les conditions historiques qui ont mené au bombardement avec beaucoup de détails qui nous étaient encore inconnus. On est forcément amené à réfléchir sur des décisions qui nous paraissent aberrantes avec du recul mais qui devaient se justifier à des dirigeants en temps de guerre. Le message principal du mémorial étant de rappeler à toutes et à tous que la bombe atomique n'est pas une arme comme les autres, et qu'elle doit à se titre voir son utilisation être interdite, c'est une vision qui a le mérite de nous interroger, en tant que citoyens d'une puissance nucléaire comme la France.
Château et jardin
Comme on l’a dit, la quasi totalité de la ville a été rasée par le bombardement, et on pourrait craindre que le centre ville soit devenu presque trop fonctionnel et optimisé par les techniques de construction modernes. D'un autre côté, on commence à avoir l'habitude de l'état d'esprit des sociétés de ce côté du monde envers les bâtiments détruits : le château d'Hiroshima a été reconstruit aussi authentiquement que possible, en fin de 20e siècle.
On achète des oracles en tant que souvenir au temple d’à côté et on parcours une fois encore un château musée, où on en apprend plus sur l’histoire plus ancienne des habitants de la région. Les sabres et les intervenants déguisés en samouraï nous font presque oublier que le bâtiment est à peu près aussi vieux que notre immeuble en France.
Tout au long du séjour on prend finalement plaisir à se promener dans une ville accueillante et au rythme agréable. Peut-être que le simple fait d’evoluer dans les boutiques et restaurants d'un lieu entièrement réduit en cendre a aussi quelque chose d’apaisant.
Après une petite balade entre bambous, étangs et îlots en forme de tortue, on prend le temps d'attendre la fermeture du jardin shukkei-en en guettant les sauts des poissons qui y vivent. Tous les poissons sont aussi athlétiques ici ?
C'est déjà l'heure de faire son sac
En résumé on a passé trois nuits à Hiroshima, et malgré les interrogations créées par la panne de téléphone, le séjour était très plaisant. En plus de la ville, c'est toute la région qui mérite qu'on s'y attarde, on a d'ailleurs dû renoncer à certaines visites aux alentours. La gastronomie est à la hauteur de sa réputation, et on ne partira pas sans avoir essayé un autre okonomiyaki, avant de se rendre dans la capitale rivale de ce plat : Osaka !